Cette lumière puissante, au centre d’un gigantesque champs piqué de faibles étoiles, habillé de lambeaux de gaz luminescent et de sombres nuages de poussières, est l’une des étoiles les plus connues de tous : l’étoile polaire. La voilà photographiée comme rarement par un amateur andalou, Javier Zayaz, qui en un composé numérique de centaines d’expositions dévoile l’environnement du pivot autour duquel, dans l’hémisphère nord, semblent tourner toutes les autres étoiles.
L’étoile polaire, appelée aussi Alpha Ursae Minoris, se trouve presque exactement au pôle nord céleste, l’endroit dans le ciel boréal vers lequel pointe l’axe de rotation de notre planète. A peu de choses près, elle indique le nord géographique et permet à un promeneur de s’orienter la nuit très facilement sans instrument. Evidemment, elle fut un symbole fort pour les navigateurs, comme les Assyriens en Mésopotamie, qui l’appelaient Stella Maris – l’étoile de mer – ou les populations Yakoutes pour qui elle était le « nombril du ciel ». Nous savons aujourd’hui que, dans l’histoire de l’humanité, elle ne joua pas toujours ce rôle en maison de la précession, le mouvement en cercle que décrit l’axe de rotation de la Terre autour de la perpendiculaire au plan de l’orbite, qui décrit un tour complet en 26 000 ans.
Ainsi, dans 12 000 ans le rôle de l’étoile polaire sera tenu par la brillante étoile de la Lyre… Véga !
Pour les astronomes l’étoile polaire est la composante principale de la constellation de la Petite Ourse, huit fois plus massive et deux mille fois plus lumineuse que le Soleil, distante de 433 années-lumière.
C’est aussi une étoile triple. Dont le premier compagnon, Polaris B fut découvert en 1780 par William Herschel ; le second, une petite étoile nommée Polaris Ab, par le télescope spatial Hubble en 2005. Enfin, cette géante est aussi l’étoile variable céphéide la plus proche de la Terre dont la luminosité varie faiblement en moins de 4 jours avec une amplitude qui change au cours du temps.
A priori banale, celle qui n’est que la 48 ème étoile la plus brillante du ciel boréal cache bien son jeu.
Au télescope, c’est une belle étoile double dont le compagnon blanc est noyé dans la lumière jaune de la supergéante. A l’œil nu, rien ne la distingue particulièrement et il faut l’épuisette à lumière du photographe pour découvrir toute la richesse et la complexité du morceau de voûte céleste au milieu duquel elle trône.
On pourrait ici caser seize foisle disque de la pleine Lune et admirer la profondeur de la prise de vue en repérant, à l’extrême gauche de l’image, l’amas d’étoiles baptisé NGC 188 de la constellation de Céphée, qui tourne autour du disque de la Voie lactée, à 5000 années-lumière de là.
A toute star, tout honneur : pour fêter le quarantième anniversaire de la chanson des Beatles, « Across the Universe », la Nasa a diffusé l’enregistrement en direction de l’étoile le 4 février 2008 ; arrivée prévue autour d’Alpha Ursae Minoris dans un peu plus de quatre siècles.
Alain Cirou
Copyright : Javier Zayaz
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